Projet Carbone Forestier : Pour une atténuation du changement climatique

1 février 2018 écrit par Stéphanie Bonnet

Organisé par le CNPF (Centre National de la Propriété Forestière), structure qui développe et oriente la gestion des forêts privées, le stage qu’a suivi l’équipe de Forêt Investissement les 13 et 14 décembre derniers, orienté sur les « Projets Carbone Forestiers » a permis de comprendre la logique qui est en train de se mettre en place en matière de sylviculture d’atténuation du changement climatique.

Animées par Olivier Gleizes, Ingénieur forestier et coordinateur du projet carbone et Simon Martel, Ingénieur Sylviculture et modélisation de l’adaptation et de l’atténuation du changement climatique, ces deux journées alliant données scientifiques, travaux pratiques, visite de terrain et présentation de Projets Carbone Forestiers, ont permis à un public varié allant d’Ingénieurs Agronomes ou Forestiers à des Responsables Environnement d’entreprises, de prendre la mesure du rôle à jouer par les forêts dans le vaste sujet que représente le réchauffement climatique...

 

Oui, les forestiers ont un rôle à jouer dans l’atténuation du changement climatique !

Comme le précise bien la Loi d’Avenir pour la Forêt de 2014 :

Sont reconnus d’intérêt général [….] la fixation du CO2 par les bois et forêts et le stockage du carbone dans les bois et forêts, le bois et les produits fabriqués à partir de bois contribuant ainsi à la lutte contre le changement climatique.

Revenir sur quelques données liées au changement climatique nous permettra ensuite de comprendre les efforts internationaux qui vont dans le sens de la réduction d’émissions de gaz à effet de serre. Enfin, au niveau de la forêt française, les propriétaires privés disposent quant à eux de quelques outils de gestion sylvicole orientés vers des notions d’atténuation du changement climatique.

 

Changement climatique : un constat scientifique

A l’heure où le changement climatique est avéré, force est de constater que la forêt joue un rôle essentiel dans la lutte contre ce bouleversement. Les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas nouvelles. En effet, on constate leur impact depuis la 2ème moitié du XXème siècle.

Aujourd’hui si nous ne faisons rien, si les pouvoirs publics n’ont pas un rôle incitatif mais aussi alarmiste en direction des collectivités, des entreprises du secteur privé mais également des particuliers, le scénario le plus catastrophique se profilera sans se faire attendre. Le GIEC (Groupe d’Expert Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat) qui a publié son dernier rapport fin 2014, donne à prendre connaissance de 4 scénarios allant du plus optimiste à la situation la plus pessimiste, c'est-à-dire le scénario RCP8.5. Dans ce scénario « catastrophe » on envisage un réchauffement climatique allant de 3 à 6 °C d’ici à 2100.

Les principaux facteurs d’élévation du niveau des mers : la dilatation thermique des océans et la fonte des réservoirs terrestres de glace, entraîneront à termes de fortes migrations de populations, compte tenu que plus d’un milliard de personnes vit au niveau des basses terres côtières.

On imagine bien également la conséquence de l’augmentation des températures au niveau de la végétation mais également des arbres en France.

Inadaptées aux grandes chaleurs et au manque de précipitations, certaines essences pourraient disparaître de notre territoire, ou en tout cas connaître des dépérissements liés au stress hydrique.

Au niveau mondial, le changement climatique, en l’absence d’adaptation en matière de pratiques, devrait avoir des conséquences négatives sur la production des principales cultures que sont le blé, le riz, le maïs ou bien encore le soja, autant dans les régions tropicales que tempérées.

Devons-nous parler d’irréversibilité ? Tout dépend en effet des politiques mondiales et de leur mise en application. A l’heure actuelle, les Accords de Paris (décembre 2015) visent un scénario à +2° C, ce qui suscite davantage d’optimisme, si ces ambitions se transforment en actes.

La forêt (et son rôle) revêt alors toute son importante car elle a un réel impact sur le climat. Il faut savoir en effet que la forêt française absorbe chaque année 10 à 15 % des émissions fossiles du pays !

Un cadre international qui incite les nations aux engagements

Depuis la signature du protocole de Kyoto en 1997 qui a mis en place un système juridique de lutte contre le changement climatique et qui consacre les forêts comme puits de carbone (à condition bien sûr qu’elles soient gérées durablement mais nous y reviendrons), la COP21 ou l’Accord de Paris a vu l’avènement du premier accord universel pour le climat qui a été approuvé à l’unanimité par 196 délégations, le 12 décembre 2015. Au cours de cette COP21, la filière bois a été officiellement identifiée pour contribuer à l’adaptation et à l’atténuation des effets du changement climatique.

Le rôle d’atténuation de la forêt française est triple : il est le résultat de la séquestration du CO2 par la forêt, du stockage du carbone dans les produits bois et de la substitution par le bois, de matériaux et énergies plus émetteurs de CO2.

Voilà en effet l’atténuation du changement climatique par la filière bois. 

 

 

En France, les Accords de Grenelle ont été concrétisés par La loi portant engagement national pour l’environnement, dite "Grenelle 2", qui a été promulguée le 12 juillet 2010. Cette loi oblige toute entreprise de plus de 500 salariés et tout établissement public de plus de 250 agents, de quantifier ses émissions de gaz à effet de serre.

La grande majorité de ces dernières n’ont pas d’obligation de compenser leurs émissions inévitables, mais elles peuvent le faire volontairement sous plusieurs formes : le mécénat, le sponsoring, les dons mais également les crédits carbone (compensation volontaire) ou bien les projets carbone forestiers pilotes, sont des pistes de compensations des émissions de gaz à effet de serre pour les secteurs tant privé que public.

Les projets carbone forestiers retiendront quant à eux toute notre attention au cours du stage.

 

Le rôle que peut jouer la forêt dans l’atténuation du changement climatique

Il est important de savoir que la forêt abrite 80 % de la biodiversité terrestre et qu’elle offre de nombreux services comme le stockage du carbone, l’épuration des eaux ou bien encore la fixation des dunes sur le littoral. La protection de la planète passe assurément par la préservation des forêts. En France, elles représentent 1/3 de la surface du pays. 74 % de la forêt française est privée et compte 89% de propriétaires de moins de 4 ha. Ce qui représente un nombre très important d’interlocuteurs lorsque l’on souhaite s’adresser à l’ensemble des propriétaires forestiers.

Il est cependant primordial que l’ensemble des propriétaires de forêts en France (comme dans le monde) soient conscients de l’importance d’une forêt gérée de façon dynamique. Actuellement, la forêt française, est considérée comme un puits de carbone.

La biomasse forestière séquestre, comme nous l’avons déjà évoqué plus haut, entre 10 et 15 %  des émissions anthropiques de gaz à effet de serre, mais la forêt permet également le stockage du carbone dans le bois, y compris lorsque ce dernier est exploité et transformé en produits forestiers comme les charpentes pour maisons ou structures diverses, les meubles, mais aussi le bois destiné à la trituration ou encore le bois énergie.

 

 

Enfin, utilisé dans la construction, le bois se substitue à des matériaux plus énergivores (aluminium, acier, béton, PVC), et est utilisé comme combustible ;  il pallie l’épuisement de ressources  considérées comme non renouvelables (pétrole, gaz, charbon).

Les 3 S, les 3 « vertus » de la forêt sont ainsi bien concrètes : Séquestrer, Stocker, Substituer.

 Vers une sylviculture climato-intelligente

Basé au sud de l’Ardèche, à quelques kilomètres de Vallon-Pont-D’Arc, le stage qui s’est déroulé plus précisément dans le village de Saint-Paul-le-Jeune, avait aussi pour but de visiter un projet carbone forestier soutenu par La Poste dont l’objectif était la réintroduction d’une espèce indigène vulnérable : le Pin de Salzmann.

L’exemple d’un tel projet carbone est l’illustration de ce que peut faire toute entreprise en France pour  « compenser » les émissions de gaz à effet de serre qu’elle produit annuellement. Des projets qui s’inscrivent dans une méthode et qui doivent être validés par une démarche de certification.

Pour qu’une structure s’inscrive dans un projet carbone forestier de compensation volontaire, elle devra remplir un cahier des charges strict.

En effet le carbone valorisé est celui séquestré en plus grâce au projet.

Il faudra donc inscrire son action dans une démarche de boisement de terre agricole, de reboisement, d’amélioration de peuplements pauvres, de balivage de taillis, de réduction des risques incendie tout en respectant la méthode forestère afférente et le Label Bas Carbone qui sera le référentiel national approuvé par le ministère de la Transition Ecologique et Solidaire en 2018. Additionnalité, permanence, quantification, certification, telles sont les conditions pour qu’une structure puisse compenser ses émissions de gaz à effet de serre avec un projet carbone forestier.

Pour qu’une structure s’inscrive dans un projet carbone forestier de compensation volontaire, elle devra remplir un cahier des charges strict.

Sachant que certaines essences stockent plus de carbone que d’autres suivant leur croissance et leur densité, il est intéressant de constater que la production de bois d’œuvre va dans le sens de projets carbone forestiers.

Il faut savoir que le coût de la tonne de CO2 stockée est actuellement évaluée à 7€50 sur le marché mondial. Ce montant est trop bas pour qu’un projet forestier puisse raisonnablement être soutenu en France. Les entreprises sont néanmoins intéressées par l’ensemble des co-bénéfices offerts par la forêt (biodiversité, emploi, paysage, économie rurale, etc…) et sont dont prêtes à financier des tonnes de CO² au-dessus du prix du marché mondial.

En résumé : vous êtes une entreprise et émettez des milliers de tonnes de CO2 par an. Les accords de Grenelle vous incitent à évaluer vos émissions, à les réduire par des politiques variées comme le co-voiturage, les économies d’énergies…Pour les émissions incompressibles (car non réductibles), vous pouvez opter pour un projet de compensation en forêt française dès  que le Label bas carbone sera opérationnel (courant 2018).

Cette démarche est volontaire, il n’y a pour le moment aucune obligation de compenser ses émissions non réductibles.

L’objectif du CNPF aujourd’hui est de montrer aux propriétaires forestiers les possibilités qui leur sont offertes pour améliorer la gestion de leurs forêts. Sachant que la France s’est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 40 % entre 1990 et 2030, et que la forêt française est encore jeune et en croissance, il est possible de monter de beaux projets carbone forestiers.

La séquestration de carbone en forêt n’est en revanche pas éternelle car la forêt française présente une capacité de stockage finie et le carbone valorisé ne peut être que celui séquestré en plus. La réduction des émissions reste ainsi l’action majeure pour être dans une démarche de lutte et d’atténuation du changement climatique.

 

La source principale de cet article est issue du stage et des documents élaborés et fournis par Simon Martel et Olivier Gleizes.

https://www.cnpf.fr/n/foret-et-carbone/n:2490

 

Référence

Forêt et Carbone – Comprendre, Agir, Valoriser (Editions IDF, 160 p.)

De Simon Martel, Loïc Casset, Olivier Gleizes – CNPF

Disponible également en version numérique sur l’application « Librairie des forestiers »

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