Construction d’un habitat atypique et alternatif sur sa propriété forestière
Qui n’a jamais rêvé de profiter d’une petite cabane aménagée au cœur de sa forêt pour passer un week-end au vert ? Le rêve Canadien peut également être français!
Cette simplicité apparente peut néanmoins cacher tout un inventaire de règles de construction qu’il convient de bien connaître avant de se lancer dans un tel projet.
Définition
On vise ici par la terminologie « habitat atypique et alternatif » l’ensemble des constructions ne disposant pas d’un régime juridique spécifique codifié par le Code de l’Urbanisme, et notamment les cabanes dans les arbres, mais également sans que cette liste ne soit exhaustive, toutes roulottes, yourtes, tipis, mobil-home, containers ou encore péniches et maisons flottantes….
La qualification juridique de ces constructions réside essentiellement dans la distinction entre :
- L’habitat permanent, ayant pour principale destination la résidence principale (au moins 8 mois par an) ;
- L’habitat de loisirs, à destination exclusive de loisirs, et donc n’ayant pas pour objet une installation permanente.
Procédure
Dans tous les cas, il convient tout d’abord de se rapprocher de la mairie de situation du terrain, afin de consulter les documents locaux d’urbanisme (POS, P.L.U., Carte Communale) en vigueur qui détermineront la zone dans laquelle se situe votre forêt, et les possibilités qui peuvent s’y exercer.
Autorisations
Les terrains visant à accueillir des résidences démontables à destination d’habitat permanent sont nécessairement soumis à autorisation. Une telle résidence est définie telle une installation aisément démontable, sans fondation, disposant de réseaux individuels lui permettant d’être totalement autonome vis-à-vis des réseaux publics (eau – électricité – assainissement), et d’équipements intérieurs et extérieurs (chauffage – douche – évier…).
Le type d’autorisation varie ainsi entre le nombre d’installations visées, et la surface de plancher totale. L’installation de plusieurs résidences d’une surface de plancher totale inférieure à 40m² nécessitera ainsi uniquement une déclaration préalable (Art. R431-35 Curb.[1]). Pour une surface supérieure, l’opération sera soumise à un Permis d’Aménager (Art. R421-19 Curb[2]). Si les terrains objet des opérations ne sont pas raccordés aux réseaux publics, ils doivent faire l’objet d’une déclaration du demandeur attestant du respect des règles relatives à la sécurité et l’hygiène (Art.L111-11 C.urb.[3]).
Habitats flottants
Les habitats flottants peuvent également être soumis à des régimes d’autorisation, suivant qu’ils disposent d’équipements pouvant assurer leur mobilité ou non, et qu’ils se situent en domaine public ou privé.
Sans équipements de mobilité, tout habitat flottant sera réputé immobilisé à perpétuelle demeure, et ainsi soumis au régime de droit commun. En cas de présence sur le domaine public, il sera également obligatoire de disposer d’une autorisation d’occupation temporaire délivrée par le gestionnaire du Domaine Public Fluvial.
Pour un habitat disposant de moyens de mobilité (type péniche), aucune formalité relative au code de l’urbanisme ne sera requise pour une présence sur le domaine public. Il faudra néanmoins disposer de l’autorisation d’occupation temporaire susvisée.
Sur le domaine privé, toute installation en plan d’eau fermé sera soumise au régime de droit commun, alors qu’une installation en plan d’eau ouvert nécessitera uniquement une autorisation du propriétaire.
Le régime de l’ensemble des autres installations dépendra essentiellement de leur présence sur un secteur aménagé à cet effet ou non.
Secteurs aménagés
On vise par les secteurs aménagés à cet effet ceux visés par l’article R.111-38 du Code de l’urbanisme[4], savoir :
- Les parcs Résidentiels de loisirs ;
- Les villages vacances classés en hébergement légers ;
- Les dépendances de maisons familiales agréés ;
- Les terrains de camping régulièrement crées (sauf créés par Déclaration Préalable ou aires naturelles).
Les installations bénéficieront alors de régime d’autorisations spécifiques selon les cas, tels qu’ils sont répertoriés dans le tableau ci-dessous.
Habitations légères de loisirs
Les Habitations Légères de Loisirs sont définies à l’art.R111-37 Curb[8] comme des installations devant remplir les critères cumulatifs suivants :
- Construction démontable ou transposable ;
- Occupation temporaire ou saisonnière ;
- A destination de Loisirs.
Sont également assimilées à des H.L.L. :
- Cabanes dans les arbres en secteur aménagé ;
- Roulottes sans moyen de mobilité en secteur aménagé ;
- Yourtes et tipis disposant d’équipements (cuisine, chauffage, sanitaires) en secteur aménagé.
Résidences mobiles de loisirs
Les Résidences Mobiles de Loisirs (ex : Mobil-Home) sont définies à l’art.R111-41 Curb [9]comme des véhicules habitables à destination d’une occupation temporaire ou saisonnière, et qui disposent d’équipements permettant leur mobilité mais auxquels le Code de la route interdit la circulation.
Les R.M.L. sont interdites en dehors des secteurs aménagés (Art. R111-42 Curb[10]).
Les auvents, rampes d’accès et terrasses amovibles sont considérées comme des installations accessoires aux H.L.L. et R.M.L. (Art R111-39[11] et 43 Curb[12]). A ce titre, elles ne sont soumises à aucune formalité, à condition d’être amovibles et démontables, et implantées dans l’enceinte des lieux dont elles constituent l’accessoire.
Les Roulottes
Les roulottes ayant conservé leurs moyens de mobilité peuvent être assimilées à des R.M.L. si elles ne disposent pas d’une carte grise.
Les roulottes disposant d’une carte grise sont assimilées au régime des caravanes (Art.R111-47 Curb[13]), savoir, en secteur aménagé :
- Dispense de formalités pour les installations occupant un emplacement inférieur à 3 mois par an, consécutifs ou non ;
- Déclaration préalable pour les installations occupant un emplacement supérieur à 3 mois par an ;
Interdiction formelle dans les bois et forêts classés en Espace Boisés Classés, ainsi que les forêts de protection classées.
Les Yourtes et tipis
Les yourtes et Tipis ne disposant pas d’équipements sanitaires (douche – évier - toilettes…), de chauffage (poêle…) voire de cuisine sont assimilées à de simples tentes, et ne sont soumis à aucune formalité particulière, si ce n’est l’autorisation du propriétaire du terrain occupé. Il est en revanche prohibe l’implantation de ces installations dans les lieux spécifiquement interdits (Art.R111-33[14]).
En dehors des périmètres de ces zones aménagées, toute installation sera soumise au régime de droit commun des constructions nouvelles, à savoir :
- Dispense d’autorisation pour les installations ayant une surface de plancher et une emprise au sol inférieure à 5m² et d’une hauteur inférieure à 12m (Art.R421-2 Curb[15]) ;
- Déclaration Préalable pour les installations ayant une surface de plancher et une emprise au sol inférieure à 5m², mais ayant une hauteur supérieure à 12m (Art.R421-9 Curb) ;
- Déclaration Préalable pour les installations ayant une surface de plancher et une emprise au sol comprise entre 5 et 20m² (Art.R421-9 Curb) ;
- Permis de construire pour toute installation ayant une surface de plancher et une emprise au sol supérieure à 20m² (Art.R421-1 Curb[16]).
Il est ici précisé que dans les communes non dotées d’un document d’urbanisme, s’applique les règles relatives au Règlement National d’Urbanisme, et notamment le principe de constructibilité limitée (Art.L111-3 Curb[17]), les constructions étant ainsi autorisées dans les parties déjà urbanisées de la commune, sauf exception.
Dans les communes dotées d’un document d’urbanisme, les constructions sont en règle générale prohibées des zones naturelles et agricoles, à l’exception des opérations liées directement, et nécessaires à ces activités.
Amende
Toute installation effectuée en méconnaissance de ces règles s’expose à une amende comprise entre 1.200 euros et un montant maximal ne pouvant excéder 6.000 euros par m² en cas de construction d’une surface de plancher, ou 300.000 euros dans les autres cas.
Cela peut être majoré d’une peine d’emprisonnement en cas de récidive.
En cas de condamnation, il est prononcé en règle générale la démolition des ouvrages en infraction, avec la remise en état des lieux, aux frais du bénéficiaire des constructions illégales.
Pour résumer, la construction d’une cabane dans sa forêt, ou de tout autre hébergement similaire, répond à des règles précises qu’il convient de respecter sous peine de voir son rêve devenir source de problèmes juridiques et financiers.
Il est ainsi important de se rapprocher de professionnels qualifiés qui pourront évaluer la faisabilité du projet notamment au regard des règles d’urbanisme en vigueur, afin de pouvoir profiter pleinement de son petit coin de paradis.
[1] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000025430879&cidTexte=LEGITEXT000006074075
[2] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006074075&idArticle=LEGIARTI000006819061&dateTexte=&categorieLien=cid
[3] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006074075&idArticle=LEGIARTI000031210199&dateTexte=&categorieLien=cid
[4] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006074075&idArticle=LEGIARTI000031719420&dateTexte=&categorieLien=cid
[5] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006074075&idArticle=LEGIARTI000031721274
[6] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006074075&idArticle=LEGIARTI000028678417
[7]https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=C99A2C91F2EFD84CEDC2046DB02CDE53.tplgfr43s_2?idArticle=LEGIARTI000034355402&cidTexte=LEGITEXT000006074075&dateTexte=20180927&categorieLien=id&oldAction=&nbResultRech=
[8] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006074075&idArticle=LEGIARTI000031719418&dateTexte=&categorieLien=cid
[9] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006074075&idArticle=LEGIARTI000031719428&dateTexte=&categorieLien=cid
[10] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=C99A2C91F2EFD84CEDC2046DB02CDE53.tplgfr43s_2?idArticle=LEGIARTI000031721209&cidTexte=LEGITEXT000006074075&dateTexte=20180927&categorieLien=id&oldAction=&nbResultRech=
[11] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006074075&idArticle=LEGIARTI000031721225
[12] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=C99A2C91F2EFD84CEDC2046DB02CDE53.tplgfr43s_2?idArticle=LEGIARTI000031721207&cidTexte=LEGITEXT000006074075&dateTexte=20180927&categorieLien=id&oldAction=&nbResultRech=
[13] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006074075&idArticle=LEGIARTI000031719442&dateTexte=&categorieLien=cid
[14] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.docidTexte=LEGITEXT000006074075&idArticle=LEGIARTI000031719406&dateTexte=&categorieLien=cid
[15] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000025542764&cidTexte=LEGITEXT000006074075
[16] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006074075&idArticle=LEGIARTI000006818998
[17] https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.docidTexte=LEGITEXT000006074075&idArticle=LEGIARTI000031210179&dateTexte=&categorieLien=cid